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Georges Clemenceau, le père fondateur de la IIIème République

Sommaire

Cet article propose d’étudier la vie de Georges Clemenceau, personnage central de la IIIème République. Il s’agit donc de traiter un sujet biographie, qui correspond à un type de sujet tombant régulièrement aux oraux d’histoire de l’ENS. Ils ne demandent pas au candidat de réciter la vie du personnage historique dans ses moindres détails, mais plutôt de montrer comment il incarne un aspect spécifique de son époque. Ici, Georges Clemenceau nous permet de comprendre les principaux mouvements politiques qui ont rythmé la IIIème République.

Présentation générale de Georges Clemenceau 

Georges Clemenceau est un personnage central du programme d’histoire de B/L puisqu’il traverse quasiment toute la IIIème République. Il s’agit également d’une figure particulièrement intéressante pour comprendre les évolutions politiques de cette période puisque, si Clemenceau conserve ses principales idées (défense de la laïcité, de l’accès à la propriété et de l’autonomie personnelle, de l’éducation, des classes moyennes, opposition à l’Allemagne et à la colonisation), il traverse tout l’échiquier politique, allant de l’extrême gauche en 1870 à l’extrême droite en 1920. 

Jeunesse et formation 

Clemenceau naît en 1841, au sein dune famille bourgeoise de tradition républicaine. Il reçoit une éducation sévère, au cours de laquelle il intègre les valeurs qu’il défendra toutes sa vie — la justice et la liberté — ainsi qu’un profond esprit de résistance. Il fait des études de médecine par tradition familiale, mais y renonce finalement et part étudier les humanités à Paris en 1861. Il y fréquente des cercles artistiques et républicains et lance l’hebdomadaire Le Travailavec son groupe d’amis (dont Méline et Andrieux). 

1870-1880 : Clemenceau à lextrême gauche 

En 1871, il tente de trouver un terrain d’entente entre Versaillais et Communards, ce qui lui attire l’inimitié des deux partis. Il démissionne de son poste de député de l’Union républicaine la veille de la proclamation de la Commune. Il est réélu député de Seine en 1876, avec un programme dans lequel il s’engage à lutter pour l’amnistie de la Commune (même s’ils sont toujours minoritaires face aux opportunistes), la laïcité et la révision des lois constitutionnelles de 1875. Après 1877, il se sépare des opportunistes et dirige le petit groupe dextrême gauche doù émergera le parti radical. Il s’opposait en effet à Gambetta qui, selon lui, n’allait pas assez loin : pour Clemenceau, les revendications des opportunistes doivent être réalisées immédiatement. 

1880-1885 : Clemenceau à gauche 

C’est à partir de cette période qu’il acquiert une réputation de « tombeur de ministères », car il fait chuter plusieurs cabinets opportunistes successifs. Ainsi, en 1881 il fait tomber le cabinet Ferry suite au traité du Bardo qui a instauré un protectorat en Tunisie ; en 1882, il fait tomber le cabinet Gambetta à cause de sa volonté d’une révision intégrale de la Constitution ; la même année, il fait tomber le cabinet Freycinet en refusant le budget pour une intervention militaire sur le canal de Suez ; enfin en 1885, il fait tomber le deuxième cabinet Ferry suite au désastre de l’affaire Tonkin.

Si Clemenceau est avec le gouvernement au début des années 1880, il est contre la République « bourgeoise » où seuls les riches sont au pouvoir. Il combat farouchement les idées de la droite de l’époque, comme la colonisation ou la libéralisation économique, qui se traduit par la politique du « laissez-faire ». 

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1885-1905 : Clemenceau au centre 

La fin du XXème siècle est marquée par larrivée des anarchistes et des socialistes, qui critiquent le système socio-économique dans son ensemble. Ils apparaissent plus à gauche que Clemenceau, ce qui le replace alors au centre de l’échiquier politique. 

Cette position politique est confirmée par son rapport au boulangisme : s’il soutient d’abord Boulanger en 1886, il soppose frontalement à lui à partir de 1888 car il juge que le boulangisme est un danger pour la République. Il l’accuse notamment de césarisme et de bonapartisme, deux formes de régimes politiques qui reposent sur le populisme. 

En 1892, le scandale de Panama, monté par la presse de droite, entraîne des accusations de corruption contre Clemenceau car il frayait avec un député corrompu. Il perd alors son mandat électoral et est discrédité pour 13 ans. 

Cependant, son engagement dans l’affaire Dreyfus lui permet de signer son retour sur la scène politique. S’il considère initialement Dreyfus comme un coupable, il ne supporte pas pour autant l’atteinte au droit dans son jugement. Le 13 janvier 1898, alors qu’il est éditorialiste à LAurore, il publie « Jaccuse » (dont il trouve lui-même le nom). Il acquiert finalement la certitude de l’innocence du général durant le procès de mars 1898. 

1906-1910 : Clemenceau à droite 

En 1906, il est nommé ministre de l’Intérieur pour remplacer Briand. Il se fait alors appeler « le premier flic de France » car il améliore la police (les brigades du Tigre, premières automobiles) et soppose à un large mouvement de grèves : il fait face aux mineurs du Nord suite à la catastrophe de Courrières en 1906 (il se rend alors lui-même sur place pour prévenir tout débordement), puis aux vignerons dans le Midi en 1907, ainsi qu’aux fonctionnaires en 1909. Cette répression successive de grèves, couplée d’arrestations massives des membres de la CGT, marque une rupture totale avec la gauche révolutionnaire. 

En 1906, il est nommé président du Conseil et défend un programme chargé : maintien de la paix avec lAllemagne, nationalisation des services publics, impôts sur le revenu (loi qui sera refusée par le Sénat) : un programme complexe à mettre en place, d’autant que les problèmes sociaux absorbent son énergie. Il parvient malgré tout à instaurer certaines avancées telles que la journée de 10h ou la retraite des ouvriers. Son gouvernement est finalement renversé par une alliance de droite et de socialistes en 1909. 

1911-1920 : Clemenceau à lextrême droite  

En 1913, il fonde le journal « Lhomme libre » où il critique ouvertement les ministères et leur gestion du conflit montant avec lAllemagne. Louis Malvy, alors ministre de l’Intérieur, censure le journal, mais celui-ci reparaît sous le nom ironique de « L’homme enchaîné ». La même année, Clemenceau fait tomber le cabinet Briand grâce au Sénat, à propos de la loi sur le scrutin proportionnel. 

On lui propose un portefeuille en 1914, mais il le refuse car Clemenceau n’est pas « l’homme de l’Union sacrée » : il était opposé à tous les partis qui en faisaient partie. Suite aux crises de 1916-1917 dues à la révolution russe qui prive la France d’un allié et à la multiplication des hostilités et des mutineries, Clemenceau est nommé président du Conseil par Poincaré, qui est désespéré. Il exerce alors un pouvoir quasi absolu par son autorité personnelle. Il rompt avec la tactique défensive et prend des mesures sévères pour la guerre, affichant une attitude ferme contre ceux quil juge comme défaitistes : il menace notamment de faire fusiller Caillaux, qui aurait « parlé » avec les Allemands, si ces derniers approchent de Paris. 

Il se voit attribuer le surnom de « Père-la-Victoire » à la fin du conflit et affirme la supériorité de la France à l’Assemblée nationale : « La France, hier soldat de Dieu, aujourd’hui soldat de l’humanité, sera toujours le soldat de l’idéal » (11 novembre 1918). Lors des négociations de paix, il est soutenu par la droite qui espère arracher le plus possible à l’Allemagne. 

Il représente la France durant la conférence de la paix de Paris en 1919 et il y défend trois priorités : la ratification de la réintégration de l’Alsace Lorraine, les indemnités financières et l’assurance de la sécurité de la frontière franco-allemande. Le traité de Versailles signé en 1919 lui permet de priver l’Allemagne de ses colonies, de l’amputer de 15% de son territoire et de limiter le réarmement.

 

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Fin de vie et postérité 

En 1920, Clemenceau perd au vote préparatoire des élections présidentielles contre Deschanel, ce qui marque la fin de sa carrière. Dans les années 1920, il fait de nombreux voyages, notamment en 1922 où il donne plusieurs conférences aux États Unis au cours desquelles il remercie le pays pour son intervention. Il finit sa vie en Vendée et meurt en 1929. 

Il laisse derrière lui de nombreux ouvrages dont : 

  • Au soir de la Pensée (1927), dans lequel il veut faire la somme des connaissances de son temps. 
  • Grandeurs et Misères dune victoire (1930) dans lequel il défend son action politique de 1917-1919 et évoque le risque du réarmement allemand, en raison de l’abandon des garanties du traité de Versailles et de la politique d’apaisement de Briand. 

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Marie Perrot
Actuellement étudiante en troisième année de double licence économie-philosophie à la Sorbonne après avoir fait une B/L, je souhaite vous aider à appréhender l'immense programme de cette filière si particulière.