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Demain est un autre conflit : Iran vs Arabie Saoudite

Sommaire

L’Iran et l’Arabie Saoudite sont les deux grands pays (en termes de superficie et de rayonnement régional) du Moyen-Orient. Ce sont aussi deux ennemis notoires, qui ne cachent pas leur haine l’un pour l’autre. En effet, le roi d’Arabie Saoudite déclare en 2010 que « deux pays au monde ne méritent pas d’exister : Israël et l’Iran ». De son côté, l’Iran attaque, sans le reconnaître officiellement, des complexes de l’Arabie Saoudite, comme à l’été 2019, où il a incendié un énorme complexe pétrolier de l’Arabie Saoudite qui se situait sur le détroit d’Ormuz. Voyons plus précisément en quoi consiste le conflit entre ces deux puissances.

 

La zone géographique

Le conflit en question a lieu au Moyen-Orient. Cette région a toujours été et est toujours sous tension. Que ce soient pour des raisons religieuses (chiisme contre sunnisme, Islam contre Judaïsme), territoriales (Israël contre Palestine) ou internationales (présence des anciens colons, des Etats-Unis et de la Russie pour les hydrocarbures), le Moyen-Orient est en pleine recomposition et la géopolitique de la région se lit actuellement sous un nouvel angle : la rupture entre le chiisme et le sunnisme, soit une guerre froide entre l’Iran et l’Arabie Saoudite.

 

Les causes

Les causes du conflit sont diverses, variées et évoluent au fur et à mesure des années. Dans un premier temps, le conflit s’expliquait par la présence des Etats-Unis, qui avaient installé le Shah au pouvoir en Iran et qui avaient signé le Pacte du Quincy avec le roi Ibn Saoud. Leur présence déstabilisait la région mais maintenait un certain calme entre l’Iran et l’Arabie Saoudite, puisqu’ils étaient, de facto, alliés. Cependant, l’arrivée de l’Ayatollah Khomeini en Iran en 1979 provoque le départ précipité des Etats-Unis du pays et instaure une révolution islamique qui place le chiisme au centre de la vie publique. L’Iran s’impose alors comme leader dans la région et beaucoup de pays suivent son exemple : l’Irak redonne du pouvoir aux chiites, la Syrie est dirigée par un président chiite (Bashar al-Assad) ou encore le Yémen qui est partagé entre le chiisme et le sunnisme. De plus, avec la montée de Daesh depuis 2005, qui est sunnite, l’Iran devient légitime puisqu’il combat l’Etat Islamique. A l’inverse, l’Arabie Saoudite est le chef de file du sunnisme et est vue comme le foyer du terrorisme par les Etats-Unis, car on sait que sur les 19 terroristes de l’attentat du 11 septembre, 15 étaient Saoudiens. Le monde occidental la soupçonne d’ailleurs de soutenir officieusement Daesh, puisque le mouvement est issu du sunnisme. L’Arabie Saoudite se sent donc de plus en plus lâchée par les Etats-Unis et durcit ses positions pour continuer à s’imposer dans la région. En ajoutant à cela « le grand retour de l’Iran » (Pascal Gauchon), l’Arabie Saoudite se voit obligée de recourir à des moyens armés pour rester une grande puissance régionale.

 

Les participants

Dans ce conflit, comme dans beaucoup d’autres, on ne peut malheureusement pas uniquement citer les deux participants principaux. En effet, le Moyen-Orient est un lieu de convoitise, qui implique donc la plupart des grandes puissances dans ses conflits. L’affaire du nucléaire iranien touche le monde entier et, d’un autre côté, le prince Mohammed ben Salman d’Arabie Saoudite inquiète les puissances occidentales. Cependant, pour éviter un conflit ouvert dans une des régions les plus stratégiques au monde (ressources en hydrocarbures, détroit d’Ormuz où circule 1/5 de la production mondiale de pétrole), les deux pays ne s’affrontent pas directement, mais via des pays interposés. Le Moyen-Orient est donc la poudrière du monde. Un seul problème dans un des pays pourrait avoir des conséquences dans tous les autres pays de la région,  voire du monde entier. Le Yémen en est l’exemple parfait.

 

Le conflit

La manifestation la plus visible de cette opposition entre l’Iran et l’Arabie Saoudite a eu lieu au Yémen. Il y a longtemps eu une séparation entre le Yémen du Nord (qui appartenait à l’empire ottoman) et le Yémen du Sud (qui appartenait au Royaume-Uni). Les deux parties se sont unifiées en 1990, ce qui fait que le Yémen, tel qu’on le connaît aujourd’hui, est un pays récent. Il a donc une république instable et subit une révolution séparatiste chiite vis-à-vis de la majorité sunnite dans les années 1990. C’est un pays qui est tenu d’une main de maître par Abdallahh Saleh. En 2012, Abd-Rabbo Mansour Hadi est élu président et le chiisme refit surface, soutenu par l’Iran. Il y a un coup d’Etat en septembre 2014 par le mouvement chiite (Houthi) qui prend une des principales villes. A partir de là, le pays est en guerre civile entre la majorité sunnite (soutenue par l’Arabie Saoudite) et la minorité chiite (soutenue par l’Iran en raison de l’arc chiite). On vit comme une « mini guerre froide » entre les deux leaders sunnite et chiite qui ne s’affrontent pas sur leur propre terre. En ajoutant à cela les activités terroristes (Al Qaïda en Péninsule Arabique profite de la situation pour s’implanter sur ce territoire), on comprend pourquoi le Yémen est un pays si instable. Cette guerre civile au Yémen est qualifiée par l’ONU de « pire catastrophe humanitaire du début du XXIème siècle ».

Malheureusement, la guerre civile au Yémen n’est qu’un exemple (certes très concret) de l’affrontement entre les deux puissances. En effet, le réel problème, qui influence toutes les relations régionales, est la création de l’arc chiite, qui fait peur à l’Arabie Saoudite, qui déstabilise les pays qui en font partie et qui légitime la montée en puissance de l’Iran. Cette expression est utilisée pour la première fois par le Roi de Jordanie en 2004. Cet arc est plus une peur sunnite du chiisme et de son expansion qu’une réalité. Même si l’éveil du chiisme depuis les années 2000 fait peur, et qu’il s’étend de plus en plus au Liban, en Syrie, en Irak, au Koweit et au Yémen, il n’y a pas de réelle volonté politique ou religieuse derrière.

 

Les enjeux

L’enjeux de ce conflit est donc bien la domination de la région. L’arc chiite le manifeste bien : ce n’est pas une prise de pouvoir du chiisme, c’est une peur des sunnites que les chiites prennent le pouvoir. De même, le chiisme est une minorité dans la région et cherche donc à rattraper son retard. De plus, cette région est naturellement sous tension à cause de la présence d’hydrocarbures qui attire les puissances étrangères. Ces dernières tentent alors de stabiliser la région en pratiquant de l’ingérence, qui ne fait, en réalité, qu’empirer la situation (l’accord sur le nucléaire iranien, la Russie et la Turquie qui s’opposent en Libye…). Plusieurs questions ressortent de ce conflit : l’arc chiite va-t-il devenir une réalité ? Cette guerre froide va-t-elle exploser en guerre ouverte ? L’Iran va-t-il finir par acquérir l’arme nucléaire ? Il faut aussi voir que cet affrontement affecte aussi les pays à l’intérieur de leurs frontières. En effet, si l’Iran cherche tant à acquérir l’arme nucléaire, c’est pour être prêt à se défendre face à l’Arabie Saoudite. De même, cette dernière tente d’asseoir son influence à l’extérieur : on peut citer l’affaire Khashoggi. Un journaliste saoudien, opposant au régime, avait été invité à l’ambassade saoudienne en Turquie, et en est ressorti mort. On soupçonne l’Arabie Saoudite d’être l’auteur du crime. La situation devient de plus en plus explosive. Ainsi, la citation de Raymond Aron n’a rien perdu de son actualité : entre ces deux Grands, « guerre improbable, paix impossible ».

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Elise Casado
Etudiante en école après 2 ans de prépa ECS, j'ai à coeur de partager avec vous mon expérience "prépa" afin de vous aider à profiter à 100% de ces deux ou trois années inégalables de votre vie !