Le 14 avril 2021, Joe Biden prononçait un discours à la Maison Blanche et affirmait qu’ « il était temps de mettre fin à la plus longue guerre d’Amérique ». Faisant ici référence à la guerre en Afghanistan, toutes les troupes mobilisées sur le sol afghan se sont retirées avant le 11 septembre 2021. Cette date fut symboliquement choisie, car elle marque le 20e anniversaire des attentats survenus aux Etats-Unis en 2001.
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Les origines du conflit
Le 11 septembre 2001, quatre avions de ligne américains ont été détournés par des terroristes. Près de 3 000 personnes ont trouvé la mort lors de cette attaque. Ces attentats, qui sont les plus meurtriers jamais perpétrés sur le sol américain, représentent alors le point de départ du conflit. Oussama Ben Laden, chef du groupe Al Qu’Aïda, a rapidement été désigné comme principal responsable.
C’est le début de la « guerre contre le terrorisme » en Afghanistan, dont le régime des talibans, qui soutient Al Qu’Aïda, donnerait refuge à Ben Laden.
Dans la nuit du 7 octobre 2001, les Américains, avec l’aide des Britanniques, ont bombardé les positions des talibans. En quelques semaines, seulement, ces derniers ont été renversés et ont fui vers le Sud et Nord-Est du pays.
Une situation qui peine à être stabilisée
Les Etats-Unis ont ensuite mis en place l’opération « liberté immuable ». L’objectif premier était d’enrayer la présence terroriste en Afghanistan et donc de capturer les chefs de l’organisation terroriste Al Qu’Aïda, dont Oussama Ben Laden.
Entre 2006 et 2011, les talibans ont regagné du terrain dans certaines zones du pays. En adoucissant leurs règles, ils sont parvenus à être mieux accueillis par la population. Ils ont ensuite changé leur tactique de combat : dès lors, l’attentat-suicide est devenu leur principale arme de guerre.
Pendant ce temps, les relations se tendaient entre les forces de l’OTAN et la population locale qui les accusait régulièrement de bavures. En 2011, l’OTAN s’est progressivement désengagée pour laisser la main aux membres des forces de sécurité afghans.
Cependant, alors qu’en 2010-2011, les Etats-Unis étaient au plus fort de leur présence avec près de 100 000 soldats déployés, la situation était toujours complexe et loin d’être stabilisée après déjà 10 ans de guerre.
La mort de Oussama Ben Laden : un tournant significatif ?
Le 1e mai 2011, Oussama Ben Laden est tué au Pakistan, par un commando des forces spéciales de la marine américaine, sous le mandat de Barack Obama. Pour ce dernier, « justice est faite ».
Il était alors temps de peaufiner un plan de retrait des troupes. Un tournant s’est dès lors amorcé : la stratégie est devenue négociation. Les Etats-Unis ont défini un accord avec Kaboul concernant les modalités de la présence américaine après le retrait des forces de l’OTAN. Des discussions ont eu lieu, mais en réalité, le calendrier de retrait des troupes a sans cesse été reporté par l’administration Obama qui le décale finalement à l’année 2017.
À son arrivée au pouvoir, Donald Trump, qui critiquait la politique d’Obama, a pourtant suivi ses pas. Selon lui, l’émergence de l’Etat Islamique dans le pays depuis 2014 était très inquiétante et les Etats Unis se devaient de maintenir leurs forces dans le pays.
Finalement, après s’être rendu en Afghanistan en 2019, Donald Trump a signé un accord avec les talibans en 2020 qui prévoyait le retrait des troupes à la mi-2021.
Un conflit ruineux et meurtrier
Il s’agit de la guerre la plus chère de l’histoire américaine puisqu’elle aurait coûté aux Etats-Unis plus de 1000 milliards de dollars.
Mais les pertes n’ont bien évidemment pas été qu’économiques. En effet, de nombreux rapports font état d’un bilan humain extrêmement lourd.
Plus de 2 300 militaires américains ont été tués lors du conflit et environ 20 000 ont été blessés.
Coté afghan, le bilan est encore plus désastreux : près de 60 000 membres des forces de sécurité afghan ont été tués. De plus, selon l’Organisation des Nations Unies, plus de 100 000 civils ont été tués en seulement 10 ans depuis 2009.
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Le retrait des troupes occidentales confirmé : une reconquête des talibans ?
Le retrait des troupes occidentales a été une source d’inquiétude et de questionnement. En effet, après l’annonce du président américain, les talibans ont multiplié leurs assauts contre le pouvoir central afghan. Et en quelques mois seulement, les talibans ont repris le contrôle de plusieurs capitales et administrent désormais plus de la moitié du territoire.
Face à cela, le président Joe Biden dit ne pas regretter sa décision et Washington est persuadé que l’armée afghane, en partie formée par ses soins, est largement capable de repousser cette avancée massive des talibans.
Au cours de ces 20 dernières années, les Etats-Unis n’ont donc pas réussi à faire fleurir une démocratie en Afghanistan et se sont récemment retirés d’un pays au bord de l’effondrement.
La situation depuis la prise du pouvoir des islamistes radicaux
Dans les rues de Kaboul, quelques mois après la prise du contrôle du pays par les talibans, la vie semble avoir repris son cours. Ces mêmes rues sont remplies de talibans, armés et en groupe. À première vue, ils semblent cordiaux. Mais cette amabilité apparente semble calculée.
L’économie de l’Afghanistan est en chute libre et le taux de chômage explose. Le système financier et l’équilibre général du pays ont énormément souffert des derniers chamboulements auxquels il a dû faire face. En plus de tout cela, une sécheresse très importante sévit et n’arrange pas la situation déjà pesante pour la population.
Tous ces problèmes représentent désormais des défis que les talibans devront surmonter pour garder le pays entre leurs mains.
Pendant les premières semaines de contrôle des talibans, la situation semblait être stable. La presse était autorisée à continuer son activité d’information. Les femmes, même si cela reste dans les limites que ce qu’autorise la loi islamique, la charia, pouvaient continuer à travailler. Pour les Afghans ayant collaboré avec les troupes étrangères, les talibans ont même accordé une amnistie.
Mais tout ceci a rapidement été modifié. La vie du peuple afghan s’articule désormais autour de la peur, la révolte et la nécessité de fuir. Les femmes voient leurs droits diminuer peu à peu. Les talibans tentent de les empêcher d’accéder notamment au monde du travail et à l’éducation. Elles sont obligées de porter un hijab, le voile, et ne peuvent sortir dans la rue, seules. Beaucoup des Afghans qui ont travaillé avec les troupes étrangères se cachent, malgré l’amnistie promise.
Les talibans se montrent bien plus radicaux que ce qui était attendu. Ce ne sont pas les anciens dirigeants talibans qui ont repris le pouvoir, mais une nouvelle génération qui donne une place à l’islamisme d’autant plus prépondérante dans l’idéologie imposée. Les minorités religieuses et les femmes ne représentent rien aux yeux du nouveau gouvernement et sont désormais, plus jamais en danger.
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