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Culture Générale ECRICOME 2024 – Analyse du sujet 2

Sommaire

Retrouvez dans cet article, sans plus tarder, l’analyse du sujet 1 de Culture Générale au concours ECRICOME 2024 !

Comme chaque année, les candidats ont le choix entre deux sujets :

  • Un sujet sur le thème de l’année « La violence
  • Un autre sujet hors-thème

Avec des coefficients compris entre 4 et 7 selon les écoles et la filière, Il faut donc ne pas négliger cette épreuve si vous souhaitez intégrer les meilleures écoles françaises !

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Analyse du sujet 2 de Culture Générale ECRICOME 2024

Cette analyse n’est évidemment pas un corrigé exhaustif de ce sujet, mais juste des propositions de pistes de réflexion qui auraient pu vous aider à traiter ce sujet.

Article rédigé par Antoine Mas (étudiant à HEC Paris)

 

Tout d’abord, proposons des définitions des différents termes du sujet.

La nécessité renvoie à ce qui est nécessaire, ce dont on ne peut se passer, ce que je dois faire. La nécessité, c’est ce qui doit arriver : soit parce que je dois le faire (par exemple, pour ma survie : la nécessité peut être un besoin, comme lorsqu’on parle des biens de “première nécessité”), ou parce que c’est inévitable (le terme “nécéssaire” s’oppose alors à celui de contingent, ce qui aurait pu ne pas être). Ici, le premier sens est à priori plus pertinent.

 

On peut définir la loi, au sens politique ou juridique, comme une règle établie par les hommes pour leur permettre de vivre en communauté. Celui qui ne respecte pas la loi subit alors des sanctions, si l’on commet un crime ou un délit.

Mais ne peut-on pas dire qu’il y a plusieurs types de loi ? On pourrait penser à la loi divine, la loi morale (Kant pourrait nous être bien utile ici..), la loi du Talion, la loi de la jungle (qui correspond justement à l’absence de loi “juridique”, la polysémie de ce terme pose déjà problème ?), ou encore une loi scientifique. Certains de ces termes pourront être utilisés dans le développement, à condition évidemment de ne pas simplement les juxtaposer.

 

Le sens de l’expression “Nécessité fait loi’, dans le langage courant, est le suivant : Dans certaines situations extrêmes, comme par exemple pour éviter un danger plus grand, il est justifié de transgresser la loi. La nécessité devient alors la loi, elle la surpasse.

 

 

 

Introduction

Une introduction réussie ne se contente pas de définir les termes du sujet.  Elle doit poser un problème. En quoi ce sujet pose-t-il problème ?

 

Chaque sujet doit être source d’étonnement de la part du candidat. Et en effet, une telle expression étonne. Si la nécessité fait loi, alors la loi peut-être transgressée alors même qu’elle était le résultat d’un accord entre les individus d’un même peuple/Etat. La loi a une visée générale, elle est abstraite pour correspondre à un maximum de situations : au nom de quoi est-il permis de ne pas la respecter ? Dire que “Nécessité fait loi”, est-ce dire que les lois n’ont plus aucune valeur ?  Il est au contraire nécéssaire de respecter la loi, ce qui fait de “Nécessité fait loi” une expression étonnante.

 

Cependant, si la loi est abstraite pour correspondre au maximum de cas possibles, elle est utilisée dans des cas différents. Autrement dit, la loi vise le général et non le particulier. Elle ne prend donc pas en compte toutes les circonstances, qui peuvent parfois justifier la transgression d’une loi. Je ne respecte pas la loi en considérant que ma transgression était nécessaire, par exemple pour ma survie ou pour celle d’autrui. Mais qui suis-je pour transgresser la loi, et pour affirmer que ma transgression était vraiment nécessaire ? Une telle expression, “nécessité fait loi”, ne peut-elle pas mener à des abus d’individus se sentant obligés de s’affranchir de la loi alors qu’ils pouvaient la suivre ? Mais alors, dire que “nécessité fait loi”, n’est-ce pas protéger le délinquant, celui qu’on devrait justement blâmer ? N’est-ce pas rendre légitime une action illégale ?

 

 

Proposition d’un plan possible

 

I/ “Nécéssité fait loi”, une expression qui remet en question le concept de loi ?

Ici, vous pouvez commencer par vous intéresser au sens de loi comme “la loi de la jungle, de la nature” : la survie. Dans la nature, il n y a pas de règle, mon seul objectif est de survivre. La nécéssité (dans le sens de la survie) fait loi, justement parce qu’il n y a pas de loi. Vous pourriez ici utiliser l’état de nature, sans Etat, de Hobbes dans le Léviathan (chapitre 13, par exemple)

En transition, on pourrait reprendre l’argument selon lequel les lois sont imparfaites et ne peuvent par définition pas s’appliquer aux cas particuliers. Mais alors, n y a t-il pas des situations dans lequelles le non-respect de la loi peut être justifié ?

 

II/ Dire que “Nécéssité fait loi’, n’est-ce pas protéger les criminels ?

Ici, on peut s’insurger contre ce proverbe, en défendant qu’il justifie les actes d’individus n’ayant pas respectés des règles préalablement existantes, et qui permettent à tous de cohabiter.

 

On pourrait ici utiliser le concept de loi morale d’Emmanuel Kant dans les fondements de la métaphysique des moeurs : “Agis de telle sorte que la maxime de ton action puisse être érigée en loi universelle”. Ici, qu’importe la particularité du cas, la loi morale doit être respectée. La loi n’est donc plus élaborée par les hommes pour cohabiter : cette loi morale est en moi, et à l’instar du ciel étoilé au-dessus de ma tête, elle “remplit le coeur d’une adoration et d’une vénération toujours nouvelles et toujours croissantes.”

Kant prend l’exemple du mensonge : le menteur ne fait et ne fera jamais un acte moral, peu importe les circonstances. Lorsque je mens, je peux penser faire le bien : mais à long terme, ce mensonge pourrait avoir des conséquences négatives bien plus grandes, si tout le monde se mettait aussi à mentir. Je n’ai pas conscience de tout ce que peut entraîner mon mensonge.

On pourrait ici également prendre l’exemple d’une loi divine : ce que je considère comme nécéssaire sera toujours inférieur aux volontés de Dieu. Pour cette idée, on peut prendre l’exemple du sacrifice d’Isaac par Abraham sur le mont Morija (par exemple en utilisant l’ouvrage de Soren Kierkegaard, Craintes et tremblements).

 

Mais alors, si la loi est transcendante et nous dépasse, qui pourrait utiliser une telle formule “Nécessité fait loi” ? Ce pourrait être le criminel, qui cherche à justifier un acte illégal et immoral ! Un individu souhaitant s’affranchir des règles de la société, et qui agit comme bon lui semble. Un surhomme nietzschéen qui méprise ce système judiciaire, mis en place par les faibles pour se protéger ? Dire “nécessité fait loi”, c’est alors protéger le délinquant, qui met en danger la société. Je ne suis personne pour dire que mon acte est “nécessaire” , indispensable pour le bien de tous. On peut ici prendre l’exemple du roman Crime et châtiments de Dostoievski, dans lequel Raskolnikov assassine une cruelle usurière, Ivanovna, qu’il considère comme une peste qu’il faut éradiquer. A l’image de Napoléon, qui a dû transgresser la loi dans un but précis, Raskolnikov se considère comme un homme extraordinaire, qui n’a pas besoin de se soumettre à des lois imparfaites. Ce qu’il considère comme nécessaire doit faire loi. N’est-ce pas là une grande preuve d’orgueil ?

 

III/ Faut-il alors s’affranchir de ce proverbe dans notre manière de concevoir la loi ?

Nous sommes ici face à une impossibilité. Si l’individu ne peut pas, seul, affirmer que “Nécessité fait loi”, qui pourrait le faire ? Les individus ne peuvent-ils pas ensemble, s’accorder sur des cas où la nécessité fait loi ? Ici, on pourrait évoquer le concept de circonstances atténuantes, ou encore celui de légitime défense : dans ce genre de cas, non seulement il est nécessaire d’effectuer cette action (pour survivre, par exemple), mais autrui considérera également mon acte comme nécessaire. Ici, on peut prendre l’exemple d’une transgression de loi légitime, comme par exemple dans Germinal de Zola lorsque les ouvriers, portés par Etienne Lantier, se révoltent contre la Compagnie et leurs conditions de travail désastreuses.. C’est leur seul moyen de se faire entendre : nécessité (ici, la survie, la volonté de s’affranchir d’une vie misérable, indigente, dangereuse) devrait faire loi. Cette révolte paraît légitime au lecteur, au vu des conditions de vie des mineurs : La nécessité de survivre devrait aboutir à une loi, l’augmentation des salaires et l’amélioration des conditions de vie.

 

Alors, ce qu’une société considèrera comme nécessaire (à sa survie, à la vie sociale, au respect entre les individus..) fera loi : affirmer que nécessité fait loi, c’est donc réaffirmer le caractère nécessaire de la loi. Sans elle, l’homme est condamné à la misère, l’insécurité, l’ignorance. Pour Hobbes (encore dans le Léviathan), l’État est un pacte auquel les citoyens adhérent. C’est pour se protéger du conflit qu’ils adhèrent à un tel pacte.

Néanmoins, les intérêts particuliers peuvent entrer avec l’intérêt de la société : personne ne vole, mais j’aimerais voler. C’est pourquoi l’Etat doit avoir un pouvoir coercitif, il doit faire peur pour que tout le monde le respecte.

 

En bref, “nécessité fait loi” souligne que les lois sont indispensables, mais également que notre manière d’appliquer la loi dépendra de ce que l’on considère comme nécessaire.

 

Bon courage pour les épreuves de la BCE !

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