Vivre vite est un récit publié en 2022 aux éditions Flammarion par l’écrivaine lyonnaise Brigitte Giraud. Ancienne journaliste, B. Giraud est une autrice prolifique. Elle a publié onze romans, deux récits sur la mort de son mari et deux recueils de nouvelles. Elle est chevalier des Arts et des Lettres depuis 2014, un contraste intéressant avec Gad Elmaleh, décoré huit ans auparavant.
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Retour sur le décès de son mari : une confession touchante
Lauréat du prix Goncourt 2022, Vivre vite est une confession où l’autrice revient sur le décès de son époux, victime d’un accident de moto. Vingt ans après le drame, elle y jette un regard rétrospectif, tout en montrant une douleur toujours vive. B. Giraud relate ce drame qui a bouleversé sa vie et celle de son fils. Elle revient sur la série de facteurs ayant conduit à cet événement tragique.
Le récit est structuré en retours successifs dans le passé, chacun mettant en scène un moment précédant la mort de son mari. Ces retours lui permettent d’exprimer tantôt des remords (« Si je l’avais appelé ce soir-là », « Si je n’avais pas dit à ma mère que j’avais les clés du garage »), tantôt des élans d’amour. Par des déclarations touchantes, elle raconte son époux, ses habitudes, son caractère.
Le contexte de l’écriture : une maison vendue, un passé refermé
Le livre s’ouvre sur la vente de la maison que le couple avait achetée ensemble. Cette vente symbolise la volonté de B. Giraud de tourner la page, de refermer une « parenthèse » ouverte avec l’accident et le premier récit qu’elle en avait tiré, publié vingt ans plus tôt. La maison est vendue, les récits sont écrits et récompensés ; la vie peut enfin reprendre.
Tout commence avec cette maison. Si Brigitte Giraud n’avait pas insisté pour déménager, la moto de son frère n’aurait probablement jamais fini dans leur garage. Claude n’aurait alors pas pu la prendre ce lundi matin pour aller travailler. Il n’aurait jamais démarré en trombe pour s’écraser contre une 2CV à l’angle du boulevard des Belges et de la rue Félix-Jacquier.
Une succession d’événements fatals
Le récit pointe les autres « responsables » de ce drame. Il y a le suicide du grand-père de l’autrice, une faveur du notaire qui leur a permis d’obtenir les clés en avance, un coup de fil entre B. Giraud et sa mère, des vacances imprévues pour son frère, une invitation déclinée, un problème de garage, un appel manqué, l’absence de téléphone portable, et bien d’autres éléments…
Un accueil médiatique mitigé
Vivre vite a suscité un débat vif après sa récompense du prix Goncourt. Fin décembre 2022, 198 000 exemplaires étaient vendus. Ce chiffre est modeste pour un Goncourt, surtout en comparaison de Le mage du Kremlin de G. Da Empoli, vendu à 320 000 exemplaires. Ce choix a été critiqué, y compris au sein du comité Goncourt. Tahar Ben Jelloun a déclaré : « Nous avons fait une grave erreur. Le Mage du Kremlin est un grand livre. Là, on s’est arrêté à un livre qui n’est pas mal, mais c’est un petit livre, il n’y a pas d’écriture ».
Mon avis personnel
Je trouve les critiques sur le succès commercial de Vivre vite hors de propos. Comme certains films légers attirent plus de spectateurs que des drames, évaluer la valeur d’un livre uniquement selon ses ventes est stérile. Les récits de deuil auront naturellement moins de succès que des romans percutants comme Le mage du Kremlin.
Quant aux propos de Tahar Ben Jelloun, ils reflètent, selon moi, une distinction élitiste entre « grande » et « petite » littérature. B. Giraud traite d’un sujet aussi personnel qu’universel avec une justesse remarquable. Son récit aborde des aspects sociologiques, en évoquant la vie des jeunes trentenaires de la fin du XXe siècle, marqués par la flambée des prix immobiliers et la quête de la maison idéale, symbole de réussite. Le livre nous replonge dans les appartements à poutres apparentes des Canuts de Lyon, les disques de rock (notamment Lou Reed), et les discothèques, ces lieux devenus rares où l’on pouvait découvrir de la musique par hasard.
Une narration qui capte le lecteur
Certains lecteurs ont critiqué la structure en « si ». Personnellement, je la trouve efficace car elle facilite l’identification aux sentiments de l’autrice. Qui n’a jamais rejoué le fil d’un événement en passant en revue des détails marquants ? Ces retours sur les éléments décisifs du destin de Claude représentent de manière réaliste l’expérience des proches d’une victime.
L’autrice adopte un ton simple, dénué de dramatisme. Ce qui aurait pu être une lamentation devient un récit empreint d’humour et de tendresse. L’ensemble, servi par une écriture délicate, se lit avec fluidité, incitant le lecteur à tourner les pages.
Pour conclure, Brigitte Giraud livre, avec Vivre vite, un témoignage poignant et captivant qui touche profondément le lecteur tout en lui offrant des moments de sourire.
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