Dans la première partie de cet article, nous nous sommes majoritairement consacrés sur les conflits interétatiques ayant pour cause principale ou secondaire les religions. Dans cette deuxième partie, nous verrons le cas des conflits intraétatiques, mais aussi les cas d’amélioration des relations diplomatiques grâce à la religion.
Les religions : vecteurs de tensions intraétatiques
Historiquement tout comme dans l’actualité, les religions peuvent être sources de tensions intraétatiques. Au début de l’article nous avons vu un exemple de guerre intraétatique à cause des religions. Nous allons donc voir ici des exemples actuels. Attention, tout comme c’était le cas pour les tensions interétatiques, les religions peuvent causer des tensions mais elles ne sont que rarement la cause unique de conflits.
Le conflit nord-irlandais : un premier exemple plus ancien
Le conflit nord-irlandais, aussi appelé « The Troubles » se passe entre 1968 et 1998. Le conflit commence avec un mouvement de droits civiques contre la ségrégation confessionnelle subite par la minorité catholique. Les violences augmentent en Irlande du Nord au sujet de son avenir. En effet, les indépendantistes irlandais veulent quitter le Royaume-Uni et créer une Irlande unifiée. Ce sont les nationalistes. Les unionistes, quant à eux, veulent rester au sein du Royaume-Uni.
Si les nationalistes veulent une Irlande unifiée c’est en partie parce qu’ils sont à majorité catholiques. Or, si la population en Irlande du Nord est à majorité protestante, le reste de l’Irlande est à majorité catholique. Connaissant une forme de ségrégation en Irlande du Nord, il serait plus avantageux pour les nationalistes de créer une Irlande unifiée.
A l’inverse, les unionistes sont à majorité protestants. Comme le Royaume-Uni est à majorité protestante, il est préférable pour eux de rester dans le Royaume-Uni.
Ainsi, les différences de vision sur l’avenir de l’Irlande du Nord entrainent des tensions sur le territoire. Ces tensions sont exacerbées par les différences de religion entre les deux partis.
Le conflit nord-irlandais s’achève avec la signature de l’accord de Belfast, également appelé l’accord du Vendredi Saint, le 10 avril 1998. Cet accord validé par un référendum réalisé dans l’ensemble de l’Irlande permet la paix en Irlande du Nord. L’Irlande du Nord reste dans le Royaume-Uni mais obtient une certaine indépendance sur certains sujets.
Avec la signature du Brexit, il y a eu des craintes quant au retour de tensions en Irlande du Nord. En effet, la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne risquait d’impliquer le retour d’une frontière fermée entre les deux Irlande. Cependant, si un accord a été trouvé permettant de garder une frontière ouverte entre les deux Irlande, il déçoit les unionistes. En effet, des contrôles douaniers seront réalisés pour des produits venant d’Irlande du Nord vers le Royaume-Uni.
Les tensions intraétatiques au Nigéria
Le Nigéria est un pays connaissant une forte instabilité. Au nord, l’instabilité est principalement due à la présence du groupe terroriste Boko Haram. Cependant, Boko Haram n’est pas la seule source d’instabilité dans le pays. Il y a des tensions intraétatiques dans le pays qui sont liées à des différences de religion. Attention : le Nigéria est un exemple où la cause principale des tensions n’est pas la religion. La différence de religion vient intensifier les tensions déjà présentes.
A cause du changement climatique et d’une augmentation de la sécheresse dans les terres au nord du pays, les éleveurs nomades et leurs troupeaux doivent migrer vers le sud pour trouver du fourrage pour les animaux. Cependant, au sud du Nigéria, il y a déjà des fermiers sédentaires qui sont installés. Le manque de terre disponible pour tous les agriculteurs et la pression sur le fourrage créent des tensions entre éleveurs nomades et fermiers sédentaires. Ainsi le conflit est principalement axé sur les ressources.
Cependant, les tensions entre éleveurs et fermiers sont exacerbées par les différences religieuses. En effet, les éleveurs nomades sont musulmans et les fermiers sédentaires sont chrétiens. La différence d’appartenance religieuse entre les deux acteurs des tensions donne une raison supplémentaire de tensions de cohabitations.
A savoir
En Afrique, il existe de nombreux conflits causés ou attisés par des questions ethniques. Nous pouvons par exemple penser au génocide Rwandais de 1994 commis par les Hutus contre les Tutsis. Comme pour les religions, les ethnies peuvent être la source principale d’un conflit ou peuvent venir exacerbée des tensions déjà existantes.
Les tensions intraétatiques en Birmanie
Il existe des violences contre la minorité musulmane des Rohingyas en Birmanie. 95% de la population birmane est aujourd’hui bouddhiste. Les tensions entre les Rohingyas et les Bamars (l’ethnie principale du pays) sont anciennes. Durant la colonisation britannique, les Rohingyas avaient des privilèges au détriment des autres ethnies bouddhistes. En 1982 les Rohingyas sont déchus de leur nationalité alors qu’elle reste accordée aux 135 autres ethnies du pays. En conséquence, les Rohingyas sont privés de nombreux droits comme le droit de vote ou l’accès à la propriété.
En 2012, il y a une montée des violences contre les Rohingyas entrainant l’internement de dizaines de milliers de Rohingyas et l’exil de plus de 100 000 d’entre eux. En été 2017, l’armée birmane pratique une vague d’exactions et de nettoyages ethniques contre les Rohingyas. Entre août et décembre 2017, il y a 720 000 déplacements forcés. Les Rohingyas fuient vers les pays voisins comme le Bangladesh ou la Thaïlande.
L’ONU parle d’un génocide contre les Rohingyas. Aujourd’hui, c’est la plus grande population apatride du monde avec plus de 2 millions de Rohingyas.
De plus, l’Arakan, région accueillant la majorité des Rohingyas est une région riche en ressources. La présence de ressources vient intensifier un conflit religieux.
Lire plus : Les dernières dictatures dans le monde (3/3)- Etude de cas de la Birmanie
Des rapprochements diplomatiques grâce à la religion
La religion est au cœur de la géopolitique mondiale. Par ce caractère central de la religion, il est possible pour les représentants des religions de servir de médiateurs pour la résolution de tensions entre États.
Le rôle du pape François dans le rapprochement Cuba-États-Unis en 2014
Depuis l’arrivée de Fidel Castro à la tête du pouvoir cubain en 1959 suite à la révolution castriste, les relations entre les États-Unis et Cuba se sont détériorées menant à la crise de Cuba en 1962. Dès février 1962, les États-Unis avaient installé un embargo commercial et financier sur Cuba. Cet embargo a connu depuis des renforcements tout comme des assouplissements.
Avec l’arrivée de Barack Obama au pouvoir des États-Unis, les relations entre les deux États s’améliorent. En effet, en décembre 2014, les États-Unis et Cuba annoncent reprendre les négociations pour parvenir à un accord de normalisation des relations.
Pour parvenir à cette annonce, le pape François a servi de médiateur entre les deux États. En effet, après avoir écrit à Barack Obama et Raul Castro sur son souhait d’un rapprochement entre les deux États, le Vatican a accueilli en octobre 2014 les négociations finales.
Ainsi, avec cet exemple, nous pouvons voir qu’un représentant de la religion peut avoir un rôle important sur la géopolitique mondiale.
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A retenir sur cette deuxième partie
Les religions peuvent être à l’origine de conflits intraétatiques ou peuvent exacerber des tensions déjà existantes. Lorsque la cause principale d’un conflit intraétatique est la religion, ces tensions peuvent amener à des difficultés pour créer un État nation.
Enfin, si la religion peut être source de tensions, elle peut aussi créer des rapprochements diplomatiques.
