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Le multiplicateur keynésien: un concept central en macroéconomie

Sommaire

Le multiplicateur keynésien est un concept central en macroéconomie, incarnant l’une des idées les plus influentes de l’économiste britannique John Maynard Keynes. Ce concept, introduit dans son œuvre “Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie”,publiée en 1936, continue de façonner les politiques économiques et analyses contemporaines.

Qu'est-ce que le multiplicateur keynésien ?

Le multiplicateur keynésien est un concept qui permet de mesurer l’impact d’une variation de la demande globale sur le revenu national. En d’autres termes, il montre comment une injection de dépenses dans l’économie peut générer une augmentation plus que proportionnelle de la production et du revenu.

En effet, selon Keynes, les dépenses gouvernementales ou les investissements sont des éléments moteurs de l’activité économique. L’idée fondamentale est que chaque unité de dépense supplémentaire génère une augmentation du revenu total, ce qui entraîne à son tour une augmentation des dépenses supplémentaires.

 

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Comment fonctionne-t-il ?

Le fonctionnement du multiplicateur keynésien s’appuie sur le concept de l’effet multiplicateur des dépenses, qui démontre comment un montant initial d’investissement ou de dépense peut avoir un effet bien plus important sur l’ensemble de l’économie. Imaginons que le gouvernement décide d’injecter un montant important dans la construction d’infrastructures publiques, telles que des routes, ponts ou écoles.

Ce montant initial est dépensé dans l’économie sous forme de salaires pour les travailleurs embauchés sur ces projets. Ces travailleurs, maintenant dotés de revenus supplémentaires, ont tendance à consommer une partie de cet argent pour acheter des biens et services, ce qui stimule la demande dans d’autres secteurs de l’économie.

Les entreprises, constatant cette augmentation de la demande, réagissent en augmentant leur production pour répondre à cette demande accrue. Pour ce faire, elles embauchent davantage de main-d’œuvre, créant ainsi de nouveaux emploisÀ leur tour, ces nouveaux employés bénéficient de revenus supplémentaires, ce qui alimente à nouveau la consommation et le cycle de dépenses.

Ce processus de dépenses et de revenus supplémentaires se répète de manière cyclique, créant un effet d’entraînement dans l’économie. L’investissement initial du gouvernement se traduit ainsi par une augmentation bien plus importante du revenu national ou du produit intérieur brut (PIB) de l’économie, dépassant largement le montant initial investi.

Calculer le multiplicateur

Pour calculer le multiplicateur keynésien, une formule simple est utilisée : multiplicateur = 1 / (1 – propension marginale à consommer).

La propension marginale à consommer (PMC) représente la proportion du revenu supplémentaire qu’un individu consacre à la consommation plutôt qu’à l’épargne. Plus cette propension est élevée, plus les ménages dépensent une grande partie de leur revenu supplémentaire, ce qui entraîne un effet multiplicateur plus important.

Prenons un exemple concret : supposons que la PMC soit de 0,8. Cela signifie que pour chaque euro supplémentaire de revenu gagné, les ménages dépensent 0,8 € et épargnent 0,2 €.

Dans ce cas, le multiplicateur keynésien serait de 5, calculé comme cela :

Multiplicateur = 1/(1−0,8) = 1/ 0,2 = 5

Cela signifie qu’un investissement initial de 100 € aura un impact final sur le revenu national de 500 €

 

Lire plus : Keynes et la politique budgétaire de relance 

 

Les facteurs influençant le multiplicateur keynésien

Outre la propension marginale à consommer, vue précédemment, le multiplicateur keynésien est affecté par divers facteurs, tels que :

  • Le contexte économique : le niveau du multiplicateur varie selon le contexte économique. En période de récession, lorsque l’économie est sous-capacitaire et que la demande globale est faible, le multiplicateur tend à être plus élevé. À l’inverse, en période de croissance économique, lorsque l’économie est proche du plein emploi et que la demande est importante, le multiplicateur est généralement moins élevé.
  • Le type de dépense : les différents types de dépenses ont des multiplicateurs distincts. Les dépenses d’investissement, telles que celles effectuées dans les infrastructures, ont tendance à avoir un multiplicateur plus élevé que les dépenses de consommation. Cela s’explique par le fait que les investissements peuvent stimuler la production future et la création d’emplois, générant ainsi un effet multiplicateur plus important sur l’économie.

L’impact du multiplicateur sur les politiques économiques

L’impact du multiplicateur keynésien sur les politiques économiques est d’une importance capitale. En période de récession ou de stagnation économique, lorsque la demande globale est en baisse et que l’économie est sous-utilisée, les gouvernements peuvent utiliser ce concept pour justifier l’adoption de mesures expansionnistes.

En effet, en injectant des fonds dans l’économie, que ce soit par le biais d’investissements publics ou de politiques fiscales expansionnistes, les gouvernements visent à stimuler la demande globale. Cette augmentation de la demande peut aider à dynamiser l’activité économique, en incitant les entreprises à produire davantage pour répondre à cette demande accrue. En conséquence, cela peut conduire à une relance de la croissance économique et  une réduction du chômage.

Les politiques économiques basées sur le multiplicateur keynésien mettent l’accent sur la nécessité d’une intervention gouvernementale active pour stabiliser l’économie. Au lieu de compter uniquement sur les forces du marché pour ajuster l’offre et la demande, ces politiques reconnaissent le rôle crucial des autorités publiques dans la gestion des fluctuations économiques.

 

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Les limites et critiques de ce concept

Bien que le multiplicateur keynésien soit un outil puissant pour comprendre les effets des politiques économiques, son utilisation comporte des limites importantes

L’une des critiques principales réside dans sa simplification excessive de la réalité économique, en négligeant les effets de rétroaction complexes et les interactions entre les différents secteurs de l’économie. Par exemple, les modèles de multiplicateur peuvent surestimer l’impact des dépenses gouvernementales sur la croissance économique en ne tenant pas compte des effets de substitution ou de l’effet d’éviction. Dans ces cas, les dépenses publiques peuvent absorber les ressources et l’épargne disponibles sur le marché, réduisant ainsi l’investissement privé. Par conséquent, le résultat net sur l’activité économique peut être moins important que prévu.

De plus, des économistes éminents tels que Robert Barro ont remis en question l’efficacité des politiques de relance basées sur le multiplicateur. Selon leurs arguments, les agents économiques anticipent les futurs impôts nécessaires pour financer les dépenses publiques, ce qui réduit l’effet stimulant attendu. Cette anticipation des hausses d’impôts peut conduire les agents économiques à réduire leur consommation et leur investissement à l’avance, contrecarrant ainsi les effets positifs des politiques de relance. En conséquence, la capacité du multiplicateur keynésien à prédire précisément l’impact des politiques de dépenses publiques peut être remise en question.

Le multiplicateur keynésien reste un pilier fondamental de la théorie économique, offrant un cadre analytique précieux pour comprendre les interactions complexes entre les dépenses, les revenus et la croissance économique. Bien qu’il puisse être critiqué pour sa simplification de la réalité économique, son influence persiste dans la formulation des politiques économiques et continue d’alimenter les débats entre économistes quant à la meilleure manière de stimuler la croissance et l’emploi.

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Amanda Jouhandin