Cet article s’appuie sur L’économie mondiale 2022 des économistes du CEPII parue en 2021. Voici quelques auteurs indispensables pour traiter correctement des sujets relevant de la stagnation séculaire.
Keynes et la stagnation séculaire
Dans “Some Economic Consequences of a Declining Population” (1937) et sa Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie (1936), JM Keynes développe sa pensée sur la stagnation séculaire. Selon lui il existe différents moyens de lutter contre elle :
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Favoriser la croissance démographique. En effet, la croissance démographique est à l’origine d’optimisme pour l’avenir : la demande anticipée est forte, ce qui porte la croissance.
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Mettre en place une politique monétaire expansive. Face à la baisse tendancielle de l’efficacité marginale du capital, bloquant alors l’investissement (qui n’est pas rentable, renvoyant alors à une situation d’effet massue), une politique monétaire expansive peut s’avérer nécessaire. Il s’agirait de baisser les taux d’intérêt pour inciter à investir. Cette action est possible jusqu’à un taux d’intérêt acceptable (a priori supérieur à zéro)
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Mettre en place une politique budgétaire. Elle permettrait de réallouer les ressources pour profiter de la propension à consommer des plus pauvres permettant d’augmenter alors la demande anticipée, et donc de rendre rentable des investissements qui ne l’étaient pas.
Lire plus : Keynes et la politique budgétaire de relance
Alvin Hansen et la stagnation séculaire
Dans “Economic Progress and Declining Population” (1939), Alvin Hansen propose son analyse de la stagnation séculaire. Il y développe la différence entre les innovations dites de “capital using” et celle de “capital saving”
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Les innovations “capital using”. Ce sont principalement celles qui ont eu lieu lors de la première révolution industrielle. Elles nécessitent de gros investissements. Les innovations de capital using sont porteuses de croissance.
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Les innovations de “capital saving”. Ce sont principalement celles qui ont lieu pendant l’entre-deux-guerres. Elles sont faiblement porteuses de croissance et amènent à la stagnation séculaire (lorsque les économies arrivent à une phase dite de “maturité”).
Face à ce constat et à cette stagnation séculaire arrivant, Alvin Hansen préconise une forte relance par l’Etat. Selon lui, elle seule permet de véritablement générer un cycle de capital using permettant de repousser cette stagnation séculaire. C’est ce que l’on peut espérer de la relance Biden avec son plan des infrastructures qui vise à moderniser routes, ponts…
Lawrence Summer et la stagnation séculaire
En 2014, Lawrence Summer propose à son tour une analyse de la stagnation séculaire. Selon lui, des phénomènes structurels augmentant la part de l’épargne et diminuant celle de l’investissement sont en cours. Pour l’augmentation de la part de l’épargne on peut mentionner le vieillissement de la population, l’augmentation des bénéfices sur les sociétés, le creusement des inégalités… Pour la diminution de l’investissement, il l’explique par le fait que les secteurs moteurs ont moins besoin de capital parce que immatériels donc moins d’investissement.
De cela en résulte un équilibre entre l’offre de capital (épargne) et la demande de capital (investissement) qui se fait selon le taux d’intérêt qui ne peut être négatif (les agents gardent leur épargne). Donc l’équilibre se fait vers 0% et toute l’épargne inutilisée
C’est là le cœur de la stagnation séculaire depuis 2008 pour Lawrence Summer : une insuffisance de la demande (investissement notamment)
Face à cette stagnation séculaire, Lawrence Summer propose les mêmes solutions que les keynésiens : une politique budgétaire (doper la demande par de fortes dépenses publiques pour utiliser le surplus d’épargne) et fiscale (redistribuer l’épargne non utilisée pour bénéficier de la propension à consommer des plus pauvres)
Robert Gordon et la stagnation séculaire
En 2015 dans “Secular stagnation : a supply-side view”, Robert Gordon exprime son point de vue sur la stagnation séculaire. Selon lui, elle trouve son origine dans l’offre et dans une forte décélération de la productivité.
Il identifie pour cela différentes causes, plus ou moins structurelles. C’est le cas de l’essoufflement de la productivité du facteur travail. En effet, on constate qu’il y a de moins en moins d’heures travaillées, une absence de croissance démographique. Il met également l’accent sur le manque d’innovation et sur leur impact sur les gains de productivité toujours moindre. C’est notamment le cas de l’imprimante 3D, de la robotique, de l’intelligence artificielle…
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